Le Musée du Quai Branly dédié aux civilisations d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques a organisé la semaine dernière la première modélisation 3D à grande échelle d’œuvres issues des arts premiers. Une occasion unique de percer les mystères de ces reliques.
La modélisation numérique des œuvres avait fait ses premiers pas en France il y a déjà quelques années et promet de mettre enfin à jour les entrailles et les derniers secrets des statuettes, masques et fétiches qui composent les collections du musée. Le procédé demeurait néanmoins complexe puisque les œuvres devaient être transportées dans les services hospitaliers disposant du matériel nécessaires ce qui ne manquait pas de créer de nombreuses difficultés : l’utilisation de transports spécifiques, des assurances lourdes et des risques d’altération, sans compter la monopolisation de scanners qui risquaient de pénaliser les patients. Les œuvres ne pouvaient subir d’examens médicaux que durant les pauses ou pendant les soirées. C’était donc seulement par lot de 4 ou 5 que les pièces pouvaient être amenées et analysées.
L’intérêt des rayons X est pourtant multiple pour les musées. Tout d’abord d’un point de vue anthropologique, ils permettent de mieux comprendre la fabrication d’une pièce et par conséquent son usage, sa charge magique ou sociétale, retrouvant ainsi ce que Philippe Charlier, le nouveau directeur du département de la recherche et de l’enseignement du musée du Quai Branly, appelle le « patrimoine immatériel ». Matières textiles ou végétales, ossements, cristaux, bijoux seront autant d’indices pour lever le voile sur le secret de ces civilisations.
Mais le scanner est également un outil de taille concernant la conservation des collections des musées. Il permet de déceler les zones abîmées ou infestées par les insectes, une menace à prendre au sérieux quand on sait que la plupart des œuvres du Quai Branly sont composées de matières organiques. De cette façon, les experts pourront intervenir avec précision au cœur des œuvres pour mieux en préserver l’intégrité. La radiographie est donc un atout certain pour les musées, elle en passe de se démocratiser pour devenir l’outil principal de la préservation des collections.
Il était devenu donc nécessaire de trouver une réponse adéquate pour pouvoir enfin analyser les œuvres au scanner sans prendre de risques inconsidérés. Sous l’impulsion de Philippe Charlier, un partenariat a été conclu avec Samsung Electronics France qui prête gracieusement un nouveau type de scanner répondant mieux aux exigences des collections du Quai Branly. Pesant 1,5 tonne, le scanner de Samsung est néanmoins portatif et mobile. En effet, a contrario des scanners traditionnels, ce n’est pas la table sur laquelle repose l’œuvre qui bouge mais le scanner lui-même, assurant la stabilité de l’objet qui doit être analysé. En l’espace de quatre jours, c’est ainsi près de 150 pièces du musée qui ont pu être scannées et modélisées en 3D, une première mondiale.
L’utilisation des scanners ne va pourtant pas sans une prévention rigoureuse des risques. DEKRA est donc intervenu pour réaliser le dossier ASN (Autorité Sécurité Nucléaire) afin d’obtenir pour le Quai Branly, une autorisation d’exploitation du scanner dans deux salles du musée. Qui plus est, Mélanie Veynachter, une collaboratrice DEKRA s’est assurée tout au long du processus du suivi dosimétrique des intervenants et du public, ainsi que du balisage de la zone réglementée. Un travail d’expert qui a permis d’éclaircir certains pans de l’histoire de l’humanité tout en mettant en place une organisation sérieuse, efficace et sûre. Un beau travail entre anthropologie et expertise sécurité auquel DEKRA a été fier de participer.
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Mélanie VEYNACHTER Superviseur en radioprotection, Mélanie Veynachter a d’abord travaillé en imagerie médicale avant de passer une formation PCR. Chez DEKRA depuis 2011, elle travaille désormais dans la région de Toulouse. |